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Aéroport de Genève

Swissport : les négociations reprennent !

Depuis deux semaines, les employé-e-s de Swissport multiplient assemblées et actions pour revenir à une CCT et non des contrats bas de gamme. Photo: Eric Roset.

Déterminés et mobilisés, les salariés de Swissport et leurs syndicats se battent depuis deux semaines et ripostent à une violente attaque contre leurs conditions d’emploi. La forte mobilisation a permis la suspension de la date couperet et la reprise des négociations en vue de la conclusion d’une future CCT. Un processus qui devra être mené à terme d’ici au 12 février.

La mobilisation a payé ! Alors que les employés genevois de Swissport avaient un délai jusqu'au 28 janvier pour signer un nouveau contrat bas de gamme pour éviter un licenciement, une formidable mobilisation a permis de suspendre ce délai jusqu'au 15 février! Lundi 25 janvier à 16h, une rencontre a eu lieu à l’invitation du Conseil d’Etat genevois pour une séance de négociation tripartite entre Etat, syndicats et direction de Swissport. Cette séance a débouché sur un protocole d’accord validé le mardi concernant la reprise des négociations pour que d’ici au 12 février au plus tard un résultat de négociation puisse être proposé au personnel de Swissport. Le Conseil d’Etat a nommé un médiateur, l'ancien conseiller d’Etat David Hiler, pour accompagner les négociations entre le géant aéroportuaire et les employés en vue de la conclusion d’une CCT. Dès lors, le délai du 28 janvier fixée au personnel pour accepter ses nouvelles conditions de travail est reporté jusqu’au 15 février. En cas d’accord, le délai sera supprimé et remplacé par l’accord négocié et validé par le personnel.

Deux folles semaines à l’aéroport de Genève

Cette séance marque le point d’orgue de deux semaines un peu folles à l’aéroport de Genève-Cointrin. Un bras de fer et une véritable course contre la montre s'étaient en effet engagés. Le compte à rebours a commencé début janvier suite à l’envoi par la direction de Swissport aux 1034 collaborateurs du site genevois de la société d’assistance au sol de nouvelles conditions inacceptables d’engagement. Les travailleurs avaient jusqu’au 28 janvier pour signer ce congé-modification… ou perdre leur emploi. Ces nouveaux contrats, qui devaient entrer en vigueur le 1er juin, prévoient des baisses de salaires jusqu’à 1200 francs par mois, un passage du temps de travail de 40h à 41h25 par semaine, l’annualisation du temps de travail, la suppression de la participation de 200 francs mensuels à l’assurance maladie, une augmentation des cotisations LPP et une réduction des jours de vacances pour une partie du personnel. En outre, le statut des auxiliaires est élargi à tous les secteurs et ils pourront être employés jusqu’à 45 heures par semaine.

« Il y a 1034 perdants pour une poignée de gagnants, résume Pablo Guarino, secrétaire syndical du SEV-GATA. Pour arriver à une baisse des coûts de 25%, la vie des salariés n’est plus prise en compte par la direction, ils ne sont que des variables d’ajustement dans un tableau Excel. Actionnaires et direction n’ont prévu aucunes réserves malgré 758 millions d'euros de bénéfices EBITDA ces trois dernières années (2017, 2018 et 2019) et ont tout siphonné. Et ce serait maintenant aux employés seuls de payer le prix de la crise du covid et de la guerre du low-cost avec d’autres entreprises sans CCT ? C’est juste inacceptable. »

Swisspoor Genève

Une assemblée en ligne des employé-e-s syndiqués au SEV-GATA et au ssp a décidé le 7 janvier d’organiser un premier rassemblement le 12 pour contester ces nouveaux contrats et réitérer la demande d’ouverture urgente de négociations des CCT selon les recommandations de la Chambre des relations collectives de travail. Les conditions imposées par Swissport ne permettent tout simplement pas de vivre à Genève une fois le loyer payé. « Je vais devoir aller voir mes enfants pour leur dire qu’ils ne pourront plus aller au sport et que même pour la nourriture ça va être difficile parce que papa perd 700 francs de salaire par mois. Je ne peux pas signer », lance Alain, un des participants.

« Sans bagarre, sans lutte et sans action, il n’y a aucune chance »

Touché par ce témoignage, le président de l’Union syndicale suisse Pierre-Yves Maillard a apporté son soutien et sa solidarité au mouvement non sans rappeler que les salaires sont déjà très bas dans ce secteur et que « sans bagarre, sans lutte et sans action, il n’y a aucune chance ».

Passage en force

La situation de blocage découle d’un choix stratégique de la direction ad interim de créer une situation de vide conventionnel depuis le 30 septembre pour soumettre les employés au chantage d’une baisse drastique de leurs conditions de travail ou le licenciement. Pendant des mois, la direction a refusé de donner des chiffres précis en vue du renouvellement des CCT. Puis, deux semaines avant la fin des négociations, la direction est venue avec un objectif de baisse de 25% des charges sans autres précisions. A aucun moment elle n’a voulu discuter les propositions de baisse raisonnable des syndicats. La direction a fait le pari d’un passage en force pour se débarrasser des syndicats et imposer ses conditions.

La direction avait sans doute compté sur une apathie des salariés sonnés après deux confinements et isolés par le chômage partiel et le télétravail. La mobilisation de ces deux dernières semaines aura bouleversé ses plans l’obligeant à parler à nouveau de CCT « au plus tard, au deuxième trimestre 2022 » dans un premier temps. A Zurich où il n’y avait pas de CCT à renouveler, le personnel consulté a accepté la CCT « de crise » conclue par les partenaires sociaux et la direction qui se traduit notamment par une baisse moyenne de 150 francs par mois pendant la crise et une flexibilisation accrue.

Satisfaction prudente

Plus de quatre assemblées de mobilisation et de lutte se sont multipliées depuis le 12 janvier devant l’ancienne aérogare et l’entrée principale de l’aéroport. A chaque fois, plus de 200 personnes discutent de la stratégie à suivre et des actions à mener. Ont ainsi été décidés un sit-in, empêché par la police, et une manifestation en ville. Ces actions ont permis à une délégation d’être reçue par le conseiller d’Etat genevois en charge de l’Economie et de l’emploi Mauro Poggia qui s’est engagé dans une sorte de médiation. Grâce à la mobilisation, la direction a accepté de rencontrer le Conseil d’Etat et les syndicats, lors d’une réunion tripartie le lundi 25 janvier. L’affaire est ainsi devenue politique.

Suite à la mobilisation sans faille des salarié-e-s de Swissport durant deux semaines, la médiation politique a forcé la direction à revenir à la table de négociation. Le mouvement a donc finalement obtenu ce qu'il voulait : que la date couperet du 28 janvier soit suspendue ! Les partis politiques genevois font également pression pour trouver une issue à la crise. Le mardi 26 janvier, le Parti socialiste, les Verts, Ensemble à Gauche (EàG) et le Mouvement Citoyen Genevois (MCG) ont déposé une motion auprès du Grand Conseil. Une majorité des députés a voté vendredi 29 janvier une motion et une résolution réclamant «des conditions salariales et de travail dignes à Swissport» et un combat contre le dumping salarial. Assistera-t-on à un retour à des CCT qui rendront caducs ces congés-modifications ? L’aéroport va-t-il cesser d’être une zone de non-droit et de sous-enchère perpétuelle ?

Même s'il faut rester prudent et mobilisé, le processus de négociation est donc lancé depuis le 25 janvier. « C’est un bon premier pas, la mobilisation a payé, réagit Pablo Guarino. Nous attendons désormais des efforts de la direction pour parvenir à un accord acceptable par toutes les parties.» Avant les prochaines rencontres avec la direction et le médiateur, une assemblée du personnel a eu lieu ce mercredi 27 janvier à 10h au terminal du parking T2 de l’aéroport pour définir les grands axes de revendication. Comme depuis deux semaines, elle a été bien suivie. Les salarié-e-s se sont montrés déterminés à conclure un accord et revenir au régime des CCT. A suivre.

Point de la situation le 26 janvier avec Pablo Guarino, secrétaire SEV-GATA.

 
 
Gallerie d'images de la mobilisation. Photos Eric Roset.

Yves Sancey

Swiss: négociation d’un paquet de crise

SEV-GATA a pu réduire considérablement les mesures de baisse des coûts exigées par Swiss pour son personnel au sol et négocier un plan de crise pragmatique. Les mesures sont limitées dans le temps entre la fin du chômage partiel et la fin de 2023. Elles comprennent une réduction d’un tiers du 13e de salaire, la suspension de la prime de rendement et une réduction de la contribution au risque du fonds de pension. En outre, le plan social fait l’objet d’ajustements. La CCT précédemment en vigueur pour le personnel au sol sera prolongée de trois ans après la fin des mesures temporaires de crise. Après la sortie de crise, le personnel touché par le plan de réduction des coûts recevra une «prime Corona» de 2500 fr. Les membres ont jusqu’à fin février pour se prononcer sur cet accord.

Photo: Flughafen Zürich AG