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Angle droit

Modification unilatérale du contrat

Jean est très en colère lorsqu’il s’adresse à l’assistance judiciaire professionnelle du SEV, il décrit par téléphone ce qui s’est produit sur son lieu de travail. Il se trouve depuis plus de vingt ans chez le même employeur et dispose d’un contrat d’engagement de droit privé privé. Il a toujours fait son travail consciencieusement. Voici soudain que son employeur lui annonce qu’il doit malheureusement réduire son temps de travail pour des raisons d’organisation. Jean passe ainsi de 100 % à 60 % avec naturellement les conséquences salariales qui s’ensuivent.

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De plus, l’employeur menace de résilier ses rapports de travail si Jean refuse la baisse du taux d’activité. Cependant, simultanément, l’employeur a relevé le taux d’occupation de deux collaborateurs plus jeunes qui occupent une fonction similaire à celle de Jean.

Jean a le sentiment d’être traité injustement et aimerait savoir si l’employeur a le droit de se comporter ainsi. Il désire connaître les possibilités de s’opposer à cette baisse du taux d’occupation décidée unilatéralement.

Si l’employeur veut modifier unilatéralement des rapports de travail et qu’il menace l’employé·e de licenciement en cas de refus des nouvelles conditions moins bonnes, nous sommes en présence d’une résiliation pour cause de modification du contrat de travail. La résiliation pour cause de modification du contrat de travail est en principe valable et autorisée dans le cadre d’une modification des conditions d’engagement, pour autant que cette dernière prenne effet non pas immédiatement, mais après écoulement du délai de congé.

Toutefois, dans certaines circonstances, les résiliations pour cause de modification du contrat de travail peuvent être considérées comme abusives. Le Tribunal fédéral admet qu’il y a un caractère abusif si la résiliation pour cause de modification du contrat de travail est utilisée comme moyen de pression pour imposer à l’employé·e un changement du contrat d’engagement désavantageux et pas objectivement justifiable. Selon le Tribunal fédéral, un changement est en particulier injustifiable lorsqu’aucune raison d’exploitation ou du marché n’explique les modifications projetées.

Il incombe à l’employé·e d’apporter la preuve que la résiliation pour cause de modification du contrat de travail n’est pas due à une raison d’exploitation ou du marché. Cette preuve, par sa nature, est difficile à apporter.

Dans ce cas précis, l’employeur aura pour sa part des difficultés à convaincre le Tribunal qu’il est contraint de procéder à cette résiliation pour des raisons d’exploitation ou de marché puisqu’il augmente simultanément le taux d’activité de deux jeunes collaborateurs dans des fonctions similaires.

Si Jean parvient à prouver qu’il y a résiliation abusive, le Tribunal infligera à l’employeur une amende dont il fixera le montant.

En conclusion, il faut admettre que de manière générale, les modifications unilatérales des rapports de travail de droit privé sont autorisées pour autant que le délai de congé est respecté. S’il n’y a pas de raison objective liée à l’exploitation imposant une modification du contrat d’engagement, l’employeur risque de devoir payer une amende pour le caractère abusif de la résiliation. Cependant, malgré la présence du caractère abusif, la résiliation reste valable.

Jean a donc la possibilité d’accepter la résiliation pour cause de modification du contrat de travail et, après écoulement du délai de congé, de travailler à taux et salaire réduits chez ce même employeur. Ou alors il peut refuser la modification du contrat d’engagement et entamer une procédure pour résiliation abusive dans l’objectif de faire payer une amende à son employeur.

Service juridique du SEV