2022
Giorgio Tuti : « Nous avons passé un cap »
L’an dernier a été fortement marqué par la pandémie de coronavirus, comme le précédent. Toutefois, pour le SEV, ce fut une bonne année sur le plan syndical. Giorgio Tuti est confiant pour l’avenir. Interview.
Nous venons de vivre une nouvelle année de pandémie difficile. Quels ont été les plus grands défis pour le SEV en 2021 ?
L’année dernière n’a en effet pas été facile. Quand un syndicat doit renoncer à sa liberté de mouvement, il est également limité dans ses actions. En effet, les contacts et les échanges avec les gens sont nos moteurs. Toutefois, le SEV a tiré le meilleur de la situation et trouvé de nouveaux moyens, parfois fantaisistes, pour rencontrer les gens et accomplir son travail syndical. D’ores et déjà, j’aimerais adresser mes compliments à mes collègues des sous-fédérations, sections, entreprises et naturellement à l’équipe de professionnels du SEV. Ce que vous avez réalisé l’année dernière est vraiment remarquable!
Je peux affirmer avec plaisir que l’année 2021 a été une bonne année sur le plan syndical. Le nombre de nouvelles adhésions n’a jamais été aussi élevé depuis 2014. Nous avons également réussi à recruter davantage de jeunes membres. Je suis très content que le SEV ait pu fonctionner de manière optimale, malgré un contexte difficile. Et ceci avec professionnalisme, comme de coutume.
Actuellement, beaucoup de personnes sont confrontées à des interrogations et des peurs. Savoir qu’il y a un partenaire de poids à leurs côtés, qui défend leurs intérêts avec vigueur, est rassurant. Le SEV était là, présent, auprès des gens – et c’est également pour cette raison qu’il était – et qu’il reste – très facile de devenir membre SEV. Les nombreux succès remportés par le SEV l’ont rendu plus tangible. C’est bien clair.
L’année dernière a-t-elle marqué un tournant dans l’évolution des effectifs ?
Oui, je crois vraiment. Dans nos actions, nous restons concentrés sur le recrutement des membres et c’est pertinent.
Bien entendu, il est délicat de parler de tendance, en se basant sur une bonne année. Toutefois, je suis confiant que cela va se poursuivre ces prochains mois. Il est important que nous restions présents pour le personnel des transports publics, que ce soit physiquement ou virtuellement; et que nous continuions de fournir nos services collectifs et individuels selon le standard élevé de qualité habituel.
Quels thèmes seront prioritaires pour le SEV en 2022, en plus du recrutement ?
Il y a trois gros points forts.
- Sur le plan socio-politique, nous continuerons de débattre sur la question des retraites. Des signatures seront récoltées contre AVS21 (voir édito) et nous lutterons contre une nouvelle détérioration de la situation des rentes. Nous soutiendrons également une initiative qui sera lancée par l’Union syndicale suisse en février. Elle demande qu’une partie des bénéfices de la Banque nationale suisse BNS soient versés en faveur de l’AVS. Les 26 milliards de francs de bénéfices de l’année dernière suffiraient à couvrir les besoins de financement supplémentaires de l’AVS pour les 10 prochaines années. Sans parler des réserves de la BNS, qui sont encore bien plus conséquentes. Il y a donc assez d’argent; nous devons juste discuter comment il faut l’utiliser. L’initiative pour une 13e rente AVS est également très importante et elle sera soumise au vote à la fin de l’année ou au début de 2023. Nous allons bientôt nous occuper de la campagne de votation.
- Un autre point fort consiste à négocier et renouveler les conventions collectives de travail (CCT), soit notre travail syndical de base. Pour nos membres, c’est la prestation la plus importante qu’ils attendent de leur syndicat. Le SEV lutte pour que leurs conditions de travail et de vie restent bonnes ou même s’améliorent. Cette année également, nous mènerons des négociations avec de nombreuses entreprises des transports publics. Nous mettrons tout en oeuvre – comme d’habitude – pour garantir la qualité élevée des conventions ou même l’améliorer.
- Pour finir, je voudrais encore mentionner le congrès SEV qui aura lieu cet automne, après l’annulation de l’année dernière en raison de la pandémie. Dans tous les cas, j’espère qu’il pourra se tenir comme d’habitude. Pour ce faire, il est primordial qu’il soit préparé et se déroule de manière rigoureuse en termes de contenu et d’organisation. Le congrès est notre organe suprême lors duquel nous discutons et définissons nos positions des prochaines années. Les textes d’orientation nous servent de boussole, nous indiquant la direction à suivre par rapport aux différents thèmes. Il y aura également des élections, telles que la présidence du comité, la direction syndicale SEV et une partie de la commission de gestion. Je me réjouis énormément pour notre congrès.
En ce qui concerne la direction syndicale: au début de cette année, Valérie Solano a repris le poste de vice-présidente, occupé pendant de nombreuses années par Barbara Spalinger. Comment le travail y sera-t-il organisé ?
Après de nombreuses années sans changement au sein de la direction syndicale, celle-ci a maintenant connu deux renouvellements en deux ans, avec l’arrivée de Christian Fankhauser et Valérie Solano. Il est bien clair que lors de tout changement dans notre équipe de quatre personnes, nous devons nous habituer les uns aux autres et nous coordonner. Deux nouvelles personnalités avec leur propre style et leurs propres expériences nous ont rejoints. Je trouve cela extrêmement enrichissant. Etant donné que ces deux personnes proviennent de l’organisation et non pas de l’extérieur, la collaboration est certainement plus simple et plus évidente. Tous deux connaissent parfaitement le SEV. Très vite, ils ont trouvé leurs marques et se sont familiarisés avec les dossiers. Le plus grand changement est au niveau de la langue: la direction syndicale est devenue plus «welsche». De ce fait, nous nous exprimerons dorénavant davantage en français, ce qui nous fera le plus grand bien. (Il rit).
Un coup d’oeil au-delà des frontières: tu as été réélu président de la section Rail de l’ETF. Quelles sont les plus grandes synergies avec le SEV ?
Je pense que le SEV et l’ETF peuvent en profiter mutuellement. La Suisse est par exemple connue en Europe pour son système efficace de transports publics. Il se base sur la collaboration, respectivement une coopération entre les entreprises de chemin de fer, au lieu de la libéralisation et la concurrence. Donc tous ensemble, plutôt que l’un contre l’autre. Le SEV a également largement contribué au développement de ce modèle. Car, nous le savons, des voix se sont élevées pour demander la concurrence et voulaient par exemple diviser la concession du trafic grandes lignes. J’affirme non sans une certaine fierté dans mes contacts avec les autorités européennes et politiques qu’ils devraient tirer des leçons de notre exemple et privilégier la coopération plutôt que la concurrence. C’est un point sur lequel nous travaillons beaucoup au sein de l’ETF.
En tant que syndicat d’un pays non membre de l’UE, le SEV tire lui profit du travail et du lobbyisme de l’ETF, ainsi que de son large réseau de relations sur le plan européen avec les autorités, le monde politique et les entreprises ferroviaires.
Pour son image, le SEV a certainement tout à gagner du fait que le président du SEV se trouve à la tête de la section Rail de l’ETF. Notre syndicat a davantage de crédibilité et de poids. En effet, la section Rail de l’ETF regroupe 83 syndicats provenant de 37 pays d’Europe et est responsable d’environ 850 000 cheminotes et cheminots.
Que souhaites-tu pour la nouvelle année, pour toi-même et le SEV ?
J’espère vivement que bientôt la pandémie n’occupera plus une place si importante dans notre quotidien, que nous pourrons à nouveau nous retrouver en présentiel et que nos nombreuses assemblées, rencontres, séances, actions et autres manifestations pourront se dérouler dans le cadre habituel.
Chantal Fischer