Editorial du Journal SEV no 8/2021
La sous-traitance, ce désastre
Le dossier des mises au concours de bus dans la Jura a pris fin de manière partiellement heureuse. Le spectre de la sous-traitance des lignes que nous dénoncions ne devrait pas se matérialiser. En effet, CarPostal a annoncé vouloir exploiter elle-même les lignes permettant ainsi aux employé-e-s qui la rejoindront de bénéficier d’une CCT de bonne qualité. Tel dénouement n’étais pas acquis d’avance, l’hypothèse d’octroyer e ses lignes à une entreprise sans CCT n’ayant été écartée que tout récemment.
Malgré cette éclaircie, il faut rappeler que la mise au concours de l’ensemble des lignes par le canton du Jura était une première suisse et qu’elle s’accompagne au final d’une économie de 4 millions de francs par année pour les collectivités publiques dont on ne sait pas exactement d’où elles peuvent provenir. En outre, plusieurs employé-e-s des Chemins de fer du Jura – qui a perdu l’exploitation de ses lignes de bus – doivent changer d’employeur par le simple jeu d’un choix politique.
L’exercice jurassien a mis en exergue toute l’absurdité d’un système qui pense pouvoir s’améliorer par le biais de la concurrence et qui n’a au final pas d’autre but que de faire baisser les coûts. D’autres cantons semblent vouloir emboîter le pas au Jura, laissant craindre d’autres périodes d’incertitudes pour le personnel concerné.
Les baisses drastiques des recettes fiscales liées à la pandémie pourraient d’ailleurs servir de prétexte au recours facile de la mise au concours avec la possibilité pour celui qui la remporte de réaliser des économies en sous-traitant le travail à des boîtes meilleur marché, bien souvent non signataires de conventions collectives de travail. Actuellement, seul le canton de Vaud a annoncé vouloir mettre fin à la sous-traitance dans les lignes de bus régionales.
Les cantons ont en effet la possibilité de fixer un cadre à leurs mises au concours. Dans l’idéal, il faudrait pouvoir réduire la marge de manoeuvre des cantons qui oublient parfois leur responsabilité sociale. Quelle société peut réellement avoir intérêt à précariser les conditions d’engagements de ses employé-e-s contribuables ?
Ce combat, syndical et politique, reste au coeur de nos priorités, encore davantage à l’heure où la pandémie fragilise les finances des collectivités publiques.
Christian Fankhauser, vice-président du SEV