14 Juin 2023
Grève féministe : le SEV vous soutient
Une marée violette a, cette année aussi, submergé de nombreuses villes suisses le 14 juin. Les attaques contre les droits des femmes, AVS21 et LPP21 notamment, n’ont pas brisé l’élan de la grève historique de 2019. Elles étaient un peu moins nombreuses, mais peut-être plus combatives, avec des slogans inventifs, des revendications musclées et une joie communicative d’être ensemble. Le SEV était présent en masse sur les lieux de travail à Lausanne et à Genève et dans les rues des principales villes de Suisse.
La grève féministe a été un succès en Suisse romande. Pour des photos du SEV, cliquez ici. Au-delà des chiffres variables, une ambiance combative, colorée, unitaire et déterminée. Entre 20 000 et 40 000 personnes à Lausanne, 8500 et 20 000 à Genève, de 6000 à 10 000 à Fribourg et des milliers à Sion. Dans le Jura, 1500 ont défilé à Delémont. Quant à Neuchâtel, entre 4000 et 6000 personnes s’y sont mobilisées. À Berne, près de 50 000 personnes sont descendues dans la rue. Auparavant, une « Landsgemeinde féministe » s’était tenue sur la Place fédérale à laquelle a participé une délégation internationale organisée par le SEV. Selon l’USS, dans toute la Suisse, plus de 300 000 personnes ont manifesté lors de la journée de grève féministe.
En plus des deux actions à la gare de Lausanne et aux tpg, le SEV était également présent aux Mouettes genevoises. La secrétaire syndicale a rencontré la directrice administrative avec deux de nos militantes pour l’entendre sur le cahier de revendications féministes que le SEV lui avait remis le 10 mai. La directrice a répondu favorablement, notamment à la création d’une charte « Tolérance Zero » (contre les violences sexistes et sexuelles, le harcèlement sexuel et les discriminations sous toutes leurs formes) qui sera annexée au règlement de l’entreprise, à 12 jours de carence par an.
D’autres revendications seront intégrées aux négociations de la CCT, à partir de septembre 2023.
Yves Sancey
Actions SEV
Santé des femmes
Le 14 juin, le SEV était présent sur les lieux de travail notamment à la gares de Lausanne et à Genève auprès des TPG et des Mouettes. Les ZPV Lausanne-Sion et Genève ont installé un distributeur de serviettes hygiéniques et de tampons pour donner l’alerte sur la précarité menstruelle. Aux tpg, un cahier de revendications féministes a été remis à la direction.
Sur le coup des 9 heures en ce 14 juin de grève féministe, une délégation d’assistantes à la clientèle de la nouvelle section ZPV Lausanne-Sion et de Genève inaugurait un distributeur de tampons et de serviettes hygiéniques dans les toilettes de leur local de pause, à la gare de Lausanne. La cérémonie était simple. La présidente de la section a levé le voile qui cachait le dispositif sous les applaudissements. Ce sont elles qui ont pris l’initiative de la mise en place de ce distributeur offert par la section.
Précarité menstruelle
Par cette action, elles veulent attirer l’attention sur la question de la précarité menstruelle, soit la difficulté financière et pratique pour les femmes de pouvoir s’offrir des protections hygiéniques ou en changer suffisamment régulièrement.
Selon Caritas, les frais liés aux menstruations durant la vie d’une femme dépasseraient les 4000 francs. Un espoir de baisse de prix pourrait arriver du parlement où le National est entré en matière sur une révision de la loi sur la TVA pour que ces produits ne soient plus considérés comme des produits de luxe et donc taxés à hauteur de 7,7 %, mais à 2,5 % comme … la litière pour chats. Les États devraient suivre. Restera à vérifier que cela conduise à une réelle baisse des prix et non à une augmentation de la marge de la pharmacie.
Jura et Vaud sont entrés en matière pour proposer gratuitement des protections hygiéniques dans les écoles. La question est ouverte dans d'autres cantons et communes suisses, avec parfois une levée de boucliers de la droite, UDC en tête et PLR. Or, il ne s’agit pas ici de simples désagréments ou d’inconfort : la précarité menstruelle peut entraîner un plus grand risque de complications liées au syndrome du choc toxique, la rétention de sang trop longue favorisant le développement de dangereuses bactéries de la famille des staphylocoques.
Charge mentale
Au-delà de la question financière non négligeable et des complications médicales sérieuses, il y a la question de la charge mentale qu'ont les femmes à devoir anticiper l’arrivée de règles parfois capricieuses. Quand on se trouve à bord d’un train ou d'un bus, le fait de savoir qu’au local de pause on peut trouver un distributeur de protections hygiéniques peut réellement soulager. Bien sûr que des locaux adaptés et propres sont aussi une nécessité. Ces problématiques concernent toutes les femmes.
À Lausanne et à Genève, deux distributeurs sont maintenant à disposition gratuitement grâce aux sections du ZPV Lausanne-Sion et du ZPV Genève. Le SEV souhaiterait ainsi lancer une réflexion sur cette question en espérant que les CFF et les ETC la poursuivent en installant ce type d’appareils là où cela aura du sens dans les toilettes femmes. Si les directions des métiers du transport veulent que leur personnel se féminise, il leur faudra tenir compte des revendications des femmes, notamment en termes d’horaires, d’infrastructures appropriées et de violence.
Cahier de revendications aux tpg
Aux tpg, un travail de réflexion a été menée depuis plusieurs mois par les délégué-e-s de la section SEV-tpg autour des revendications féministes du 14 juin pour améliorer les conditions de travail des femmes. En effet, même si les métiers des transports tendent à se féminiser, les femmes y sont encore très minoritaires. Leur présence est freinée par différents facteurs.
Dans le but de permettre aux femmes et aux minorités de genre d’obtenir enfin l’égalité, la section SEV a remis au collège de direction des TPG son cahier de revendications féministes à 13 h 33, soit le moment à partir duquel les femmes commencent à travailler gratuitement (en tenant compte du temps partiel).
En plus de revendications développées dans l’article ci-dessus, sur les questions de conciliation vie professionnelle – vie privée, respect et sécurité au travail, égalité salariale et infrastructures, trois points importants ont été développés : la création d’une crèche d’entreprise aux horaires d’ouverture pertinents selon l’activité des secteurs du Technique et de l’Exploitation, une meilleure prise en compte des problématiques de santé des femmes (menstruation, ménopause) et des locaux d’allaitement adaptés, à l’accès facile et sécurisé.
Yves Sancey
Conférence des femmes SEV : comprendre la mécanique sexiste
Le 2 juin 2023 restera dans les annales comme la 1ère journée dédiée exclusivement aux femmes du SEV. Son but : mettre en lien les collègues travaillant dans les ETC et les CFF ; débattre des préoccupations propres aux femmes dans les transports publics et créer un cahier de revendications féministe.
Une quinzaine de collègues ont répondu présentes à l’invitation. Les attentes étaient grandes avec une volonté commune : rencontrer d’autres femmes pour sentir un élan et une solidarité nécessaires afin de faire changer les choses.
La journée a commencé par un historique de la lutte féministe en Suisse. L’évocation de quelques dates clés ont souligné la lenteur des avancées politiques et sociales.
Parler de la grève du 14 juin 1991 a montré les avancées obtenues – loi sur l’égalité, assurance maternité – mais a aussi démontré que, 32 ans plus tard, les revendications restent à peu près les mêmes : chances de formation identiques, lutte contre le harcèlement sexuel au travail, égalité dans le domaine de la sécurité sociale, plus de places de crèche, horaire continu dans les écoles et partage des tâches domestiques.
Grâce au remarquable travail effectué par le Collectif de la Grève féministe, qui a compilé les statistiques de l’Office fédéral de la statistique, les inégalités de genre sont expliquées grâce à des chiffres concrets qui font froid dans le dos. Lorsque l’on constate qu’en 2020, on a dénombré deux féminicides par mois en Suisse, c’est insupportable. Lorsque l’on s’aperçoit que la part inexpliquée de l’écart salarial entre femmes et hommes était de 48 %, soit 717 francs en 2020 et qu’elle a augmenté depuis 2016 aussi, ou encore lorsqu’on constate que le travail non rémunéré effectué en grande majorité (60 %) par les femmes représente rien de moins que la somme de 259 milliards.
Des informations qui ont suscité une discussion passionnante parmi les collègues présentes, lesquelles ont pu apporter leurs propres témoignages au sujet des difficultés rencontrées au quotidien, aussi bien sur le plan professionnel que personnel. Des remarques sexistes faites p. ex. aux conductrices de train ou de bateau en passant par les difficultés rencontrées pour obtenir un poste à responsabilité, avoir accès à des toilettes ou encore obtenir un uniforme adapté à la morphologie féminine : les embûches sont fréquentes juste parce que l’on est une femme.
Les racines de ces problématiques sont profondes, comme l’a démontré la docteure en sciences sociales Églantine Jamet, venue faire une intervention sur la question des stéréotypes de genres. Un exposé passionnant qui explique que le genre est une construction sociale et que l’on fait des différences parce que la société de consommation dans son ensemble structure en genres. Deux messages clés sont adressées aux petites filles : l’apparence physique et le soin des autres. Le problème de ce système est qu’il enferme dans deux pôles (féminin et masculin) sans possibilité de choisir. Pire, si on va du côté du féminin, on se déclasse. Il n’y a qu’à regarder la manière dont les garçons qui pratiquent la danse classique sont considérés. Pour les femmes cadres qui travaillent dans des milieux masculins, le droit à l’erreur est inexistant. Casser cette dynamique ne peut passer que par la formation dès le plus jeune âge ; par l’introduction de la mixité à tous les échelons des entreprises ; par un véritable partage des tâches dans l’espace privé.
Les collègues réunies le 2 juin ont donc élaboré un cahier de revendications (voir ci-dessous) que chaque section des entreprises de transports publics pourra décider de porter à sa direction pour organiser des échanges réguliers sur ces thématiques.
Patricia Alcaraz
Cahier de revendication
• Meilleure conciliation vie professionnelle – vie privée :
- Développement du temps partiel pour toutes et tous ;
- Création de crèches d’entreprise ;
• Respect et sécurité au travail :
- Création d’une charte TOLERANCE ZERO à l’encontre des violences sexistes et sexuelles, du harcèlement sexuel et des discriminations sous toutes leurs formes ;
- Formation obligatoire continue des employé-e-s et de l’encadrement aux sujets des discriminations, du harcèlement sexuel, des violences sexistes et sexuelles et du mobbing ;
• Egalité salariale :
- Création de processus de contrôle garantissant l’égalité lors de la fixation du salaire d’entrée dans l’entreprise ;
- Contrôle régulier du respect de l’égalité salariale garantie par la LEg et définie par l’existence de grilles salariales ;
• Santé :
- Meilleure prise en compte des problématiques de santé des femmes ;
• Maternité – Paternité :
- Meilleure prise en compte des problématiques liées à la grossesse ;
- Protection d’un an contre le licenciement au retour du congé maternité ;
- Prise en compte dans l’expérience professionnelle des années consacrées à l’éducation des enfants ;
- Deux semaines de congé paternité supplémentaires ;
• Infrastructures :
- Des toilettes et des vestiaires adaptés pour le personnel féminin, et en nombre suffisant ;
- Des uniformes respectant la physionomie des femmes ;
- Des locaux d’allaitement adaptés.
Impressions de la grève féministe 2023
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