| Actualité / journal SEV

Pas de participation au bénéfice pour le bon peuple des CFF?

Faites ce que je dis, pas ce que je fais

568 millions de francs, c’est le bénéfice réalisé par les CFF en 2018. Un tel gain n’a été possible que grâce aux collaborateurs qui, en raison de leur engagement et au prix de charges supplémentaires dues aux programmes d’assainissement et à l’augmentation de la productivité, ont contribué à ce résultat. Et en guise de remerciement, ils devraient ne rien obtenir. Le chef du personnel prétend qu’ils ont déjà reçu leur part, ce qui n’est absolument pas vrai.

Le personnel des CFF a déjà fait de nombreux efforts pour la caisse de pension et avait protesté lors de la conférence CCT du 15 avril 2015. Les CFF considèrent la garantie de déficit accordée lors des dernières négociations comme «cadeau» en faveur du personnel...

«Nos collaborateurs profitent bien entendu de ce bon résultat et de façon durable», affirme le chef RH Markus Jordi dans l’Intranet CFF. Le bon résultat annuel 2018 s’est déjà dessiné au dernier trimestre 2018 et la direction du groupe a alors «longuement discuté» de la façon dont les quatre parties prenantes, soit la clientèle, le propriétaire, les commanditaires et les collaborateurs, pourraient être prises en compte et de façon équilibrée. «Concernant le personnel, il était important pour nous de ne pas allumer un feu de paille et de ne pas simplement distribuer de l’argent. Cela n’a d’effet que sur le court terme et n’a rien à voir avec de la reconnaissance», explique M. Jordi. Pour cette raison, la direction du groupe a «défini» quatre mesures en faveur des collaborateurs. «Ce verbe n’a pas été choisi par hasard car ces quatre mesures avaient déjà été mises en place avant, indépendamment du résultat annuel» réplique Manuel Avallone, vice-président SEV. «Toutes les quatre n’ont rien à voir avec la participation aux bénéfices que nous demandons car les collaborateurs ne les ressentent pas directement. Et elles sont utiles à l’entreprise aussi.» Voici le détail des mesures commentées par Manuel Avallone.

SEV, le journal: Pourquoi est-il trompeur de présenter le versement de 10 millions de francs par les CFF au Fond de numérisation comme une participation aux bénéfices?

Manuel Avallone: Le versement de 10 millions dans le fonds de numérisation avait été promis par les CFF aux partenaires sociaux déjà dans le cadre des négociations CCT. Le développement et la compétence des collaborateurs font partie des obligations de chaque entreprise, soit former et faire évoluer ses collaborateurs de sorte qu’ils puissent maîtriser le virage numérique, ce qui est bien sûr aussi en faveur de l’employeur. Ce devoir est aussi valable pour chaque entreprise dans les années non performantes.

Comment est-on arrivé au versement par les CFF de 5,5 millions dans la fondation paritaire Valida (pour des mises à la retraite anticipée de collaborateurs faisant partie de groupes professionnels particulièrement exposés et avec des bas salaires)?

Ce versement a été mis en œuvre par le conseil de fondation déjà au 2e trimestre 2018, ceci sur recommandation du nouvel expert de la caisse de pension. Celui-ci avait en effet calculé que le capital de départ que les CFF avaient mis à disposition en 2015 pour la fondation était trop petit en raison d’estimations erronées (entre autres le nombre de retraites anticipées). Nous devons dire clairement que les CFF ont aussi un intérêt vital à la possibilité d’envoyer des collaborateurs en retraite anticipée. Car, premièrement, lors de réorganisations (et les CFF n’en sont pas avares), des solutions socialement supportables peuvent être trouvées pour les collaborateurs âgés. Deuxièmement, les CFF épargnent des coûts de morbidit. De plus, les assurés Valida contribuent eux-mêmes au financement de la fondation avec un pour-cent prélevé sur le salaire.

Que dis-tu à propos des 5 millions des CFF pour le fonds amiante national?

Vendre ces 5 millions de francs comme participation aux bénéfices est vraiment cynique car seules les victimes de l’amiante et leurs proches profitent de ce fonds. Les CFF ont traité trop longtemps l’amiante avec légèreté et aujourd’hui c’est la moindre des choses qu’ils peuvent faire que de s’excuser auprès des victimes et de leurs proches et de participer convenablement au dédommagement des victimes.

Qu’en est-il de la garantie des CFF de 116,5 millions pour la Caisse de pensions?

Présenter cette garantie comme participation aux bénéfices est également incongrue. Car cet argent, les CFF ne doivent le payer que dans l’hypothèse où la CP entrerait en sous-couverture dans les cinq prochaines années et qu’elle devrait être assainie. Et les assurés devraient alors aussi participer à son assainissement et accepter par exemple une réduction du taux d’intérêt du capital-vieillesse. En outre, les collaborateurs renoncent à un jour de vacance et, jusqu’en 2020 à des mesures salariales générales. De plus, les syndicats ont accepté une augmentation du contingent des contrats selon le CO passant de 5% à 7,5%.

Cette garantie n’est-elle pas également sortie de son contexte?

La garantie n’est qu’une mesure parmi d’autres sur laquelle les CFF et les syndicats se sont mis d’accord en février 2018, en vue d’amortir la diminution des rentes de 6,5% due à la baisse du taux de conversion. A cet effet, la CP a augmenté au 1er mars 2019 tous les avoirs de vieillesse de 2,5%, avec son propre capital. En tout, pour quelqu’un âgé aujourd’hui de 50 ans, les mesures convenues amortissent la baisse des rentes à environ 3%. Finalement, malgré la garantie CFF, la réduction du taux de conversion entraîne pour les collaborateurs une perte. Surtout qu’à partir de l’âge de 40 ans, ils doivent désormais payer des cotisations à la caisse de pensions de 1% plus élevées.

Finalement, ces quatre mesures de participation aux bénéfices tiennent-elles de la mauvaise foi?

Les quatre prétendues mesures sont de la poudre aux yeux pour faire croire aux collaborateurs qu’ils ont déjà reçu leur part. Ces mesures n’ont rien à voir avec la participation aux bénéfices demandée par le personnel car le SEV veut qu’un tel geste se remarque dans le portemonnaie. Et la manière dont les collaborateurs pensent utiliser leur part ne doit pas être le souci du chef du personnel.

Si la direction du groupe trouve que des versements en argent ne sont que des « feux de paille » et qu’ils n’ont rien à voir avec une vraie reconnaissance et donc qu’une participation aux bénéfices n’a rien de durable, alors elle doit être conséquente et renoncer à ses bonus. Car encaisser des bonus et en même temps priver une grande partie des collaborateurs d’une part aux bénéfices, cela ne va pas – et c’est clairement une question de reconnaissance !

Markus Fischer

Enable JavaScript to view protected content.

Commentaires

  • Martinez Jose

    Martinez Jose 26/04/2019 11:16:05

    Il serait temps que le SEV bouge ses fesses, pour être poli, pour que la pénibilité du travail soit prise en considération, pour avoir un âge de mise à la retraite plus bas, certaines branches, par exemple, police, construction, peuvent partir à la retraite à 60 ou 62 ans, j'ai bientôt 30 années de service, dont plus de 20 d'horaires irréguliers (y compris avec travaux pénibles) j'estime que des cas comme le mien devrait pouvoir partir à 62 ans à la retraite (non anticipée !!) j'ai déjà eu des commentaires du style, oui mais tu bosses le week-end, la nuit, tu gagnes plus, oui je touche des indemnités pour ce travail, mais sur ces indemnités, je côtise mon AVS et 2ème pilier, donc je côtise plus qu'une personne "normale", il y a une usure physique supplémentaire, mais c'est plus facile de faire bosser si possible jusqu'à 67 ans et mourir au boulot que de se faire mettre en retraite !! sans compter que ça libère des places pour les jeunes et éventuels chômeurs !!