Angle droit

Effets suspensifs d'un recours

Les conditions d’octroi de rentes d’invalidité (AI) se sont fortement durcies ces dernières années, à la faveur de révisions de Loi portées par la majorité de droite du Parlement fédéral.

Les cas de révision de prestations AI aboutissent de plus en plus souvent à des baisses, ou même à la suppression de rentes. Or, même s’il reste le recours auprès des tribunaux, un problème se pose très vite: le retrait de l’effet suspensif du recours. La conséquence est que, tout au long de la procédure de recours, la rente reste diminuée, ou supprimée et il faut attendre l’issue du jugement, parfois pendant des mois. Les questions juridiques, et leurs conséquences sociales et humaines, posées dans la situation présentée ici font l’objet d’une analyse critique.
Georges touche une rente AI entière depuis de nombreuses années. Mais une récente décision de l’Office cantonal de l’assuranceinvalidité la supprime. En outre, l’effet suspensif d’un éventuel recours est retiré. Malgré que le Tribunal cantonal donne, dans un premier temps, raison à Georges, l’Office AI porte l’affaire devant le Tribunal fédéral (TF). Et Georges va perdre la partie.
Selon le TF, compte tenu des montants de rentes en jeu, Georges ne pourrait vraisemblablement pas rembourser les prestations si le jugement final devait lui être défavorable. L’intérêt de Georges à pouvoir continuer à bénéficier de la rente qu’il percevait n’est pas si important, selon le Tribunal. A moins d’admettre que, selon toute vraisemblance, Georges obtiendra gain de cause. Même la situation matérielle difficile dans laquelle Georges se trouve depuis la suppression de sa rente d’invalidité n’est pas un argument suffisant aux yeux du TF. Au contraire, l’intérêt de l’administration (donc de l’AI) est considéré comme plus important. Dans l’hypothèse où l’effet suspensif serait accordé et le recours serait finalement rejeté, il y aurait effectivement à craindre, du point de vue du TF, que la restitution des prestations versées à tort ne soit pas possible.

 L'équipe de la protection juridique

Commentaire

De la situation présentée ci-dessus, on peut conclure ceci: le fait que Georges ne touche plus de rente pendant toute la durée de la procédure n’est pas un argument assez fort, à moins qu’on soit sûr, dès le départ, que le TF va lui donner raison. La question qu’il est légitime de se poser est alors celle-ci : pourquoi supprimer la rente de quelqu’un, si on est sûr qu’elle sera restituée en cas de recours ? Et, a contrario, comment justifier cela par le seul intérêt de l’assurance à éviter les démarches de restitution des prestations indues ? D’un côté, on a une administration, de l’autre un être humain confronté à des problèmes matériels et existentiels. La pesée d’intérêts pratiquée ici - et confortée par la jurisprudence - est particulièrement choquante.