CFF Cargo : pas touche au trafic et au personnel
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Sous le titre « Planification du personnel CFF Cargo », la filiale marchandises des CFF a informé le 3 novembre la communauté de négociations (CN) composée du SEV, Transfair, VSLF et ACPT du projet de démantèlement d’un cinquième de son personnel d’ici 2030. La CN exige aujourd’hui la suspension de cette suppression de postes et de toute la réorganisation dite « G-enesis ». « Cette démarche fait fausse route », souligne Philipp Hadorn, secrétaire syndical du SEV.
La suppression de personnel n’est qu’une des mesures prévues par « G-enesis », grâce auxquelles l’entreprise souhaite abaisser ses coûts d’une soixantaine de millions de francs par année, afin de remédier à son actuel déficit structurel et de rétablir sa capacité d’investissement. Des transports ayant été perdus ces derniers mois en raison de la faiblesse de la conjoncture, Cargo a l’intention d’éliminer 80 postes complets en 2025.
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De plus, CFF Cargo entend « optimiser » le réseau du trafic de marchandises par wagons complets isolés (TWCI) en réduisant les points de desserte, en flexibilisant les heures de desserte, en améliorant le roulement des locomotives et en augmentant les quantités transportées. Il est prévu de remplacer l’ancien matériel roulant par des véhicules en moins grand nombre, plus modernes, moins gourmands en maintenance et moins typés. Automatisation et numérisation sont aussi censées accroître l’efficacité.
Grâce à des augmentations de prix, Cargo souhaite engranger chaque année 50 millions de francs de plus. Les départs de la clientèle sont déjà compris dans ces calculs : Cargo s’attend à ce que ces augmentations de prix et la réduction du réseau TWCI lui fassent perdre jusqu’à 15 % du volume transporté, au profit de la route.
Enfin, CFF Cargo espère toucher de la Confédération les contributions financières que prévoit la révision de la loi sur le transport des marchandises. La révision a d’ores et déjà été approuvée en septembre par le Conseil des États et passera devant le Conseil national en mars. Mais ces contributions sont limitées dans le temps.
Autonomie financière ? Irréaliste !
La CN a requis une procédure de consultation et, le 10 janvier, a pris position sur ce projet de réorganisation. Dans sa lettre, elle critique avant tout l’objectif irréaliste de rentabilité propre. « Depuis sa création en 1999, CFF Cargo SA n’a cessé, au gré d’innombrables réorganisations, de viser la rentabilité, mais n’y est jamais parvenu », explique Philipp Hadorn, en charge du dossier Cargo auprès du SEV. « L’explication réside dans le fait que le transport des marchandises par la route ne doit supporter ses coûts que de manière limitée, raison pour laquelle il jouit d’un avantage concurrentiel considérable par rapport au train ».
Dans ces réorganisations, le démantèlement successif du réseau TWCI a eu pour conséquence que la part de CFF Cargo dans le volume global du transport des marchandises en Suisse n’a cessé de régresser. Le SEV voit donc d’un œil très critique ce projet de future réduction du réseau TWCI. Il en va de même concernant la suppression du personnel et du matériel roulant. « Le SEV reconnaît et soutient les efforts déployés par les CFF et Cargo afin de percevoir de la Confédération des moyens supplémentaires pour le transport des marchandises par le rail. Mais la limitation dans le temps du subventionnement n’est pas une bonne idée, justement parce que le TWCI ne pourra jamais fonctionner de manière financièrement autonome », poursuit Hadorn. Pour le SEV, il est indispensable que les subventions soient accordées à durée illimitée et approuvées à la majorité. La Suisse aussi est tenue d’atteindre ses objectifs climatiques, et le transport des marchandises par le rail, respectueux du climat, apporte une précieuse contribution à cet objectif.
Réduire le personnel : pas un objectif et néfaste
En se fixant la rentabilité pour objectif, CFF Cargo rate donc sa cible. Il la rate aussi en procédant de manière incompréhensible au démantèlement de son personnel. Dans sa prise de position, la CN relève que les effectifs du personnel sont aujourd’hui déjà fortement réduits, à tel point que les suppressions de postes planifiées ou la décision de ne pas repourvoir les postes vacants devraient rapidement conduire à des pénuries de personnel. « Des signes montrent qu’aujourd’hui déjà des employé·es souffrent beaucoup de la charge de travail qu’ils doivent supporter, ce qui entraîne des risques et des absences supplémentaires », précise Hadorn. De plus, il faut craindre une perte de savoir-faire que l’entreprise risque de payer cher par la suite, comme ça a été le cas lors de précédentes réorganisations. Face à la numérisation et l’automatisation, le SEV met en garde : avant de supprimer précipitamment du personnel, mieux vaut attendre que les nouveaux processus de travail et techniques aient fait leurs preuves sur le terrain.
Le projet « G-enesis » doit être suspendu
« Les mesures de démantèlement proposées ne produiront pas l’effet escompté, même pas à court terme, et serviront encore moins à une extension de la part du rail dans le transport des marchandises en Suisse. C’est pourquoi il convient de suspendre toutes les mesures de restructuration et la mise en œuvre de G-enesis », résume Hadorn. Avant de compléter : « L’actuelle faiblesse conjoncturelle peut et doit être amortie par d’autres moyens ». Et la prise de position de la CN de culminer avec cet avertissement : « Si ce projet de transformation est mis en pratique, nous ne serons en mesure ni de réduire au sein du personnel l’énergie corrosive qui, c’est prévisible, menacera l’existence de l’entreprise, ni de soutenir ces mesures d’application ».
Le 15 janvier, Cargo a répondu qu’il entendait maintenir le cap qu’il s’était donné, mais qu’il se déclarait disposé à « reconsidérer d’un peu plus près la surface de la production » et à prolonger le calendrier, afin de clarifier avec la CN les questions qu’elle souhaite aborder. CFF Cargo souhaite aussi « prendre en considération, dans tous les secteurs, les possibilités disponibles d’un maintien de l’emploi » et « bien entendu, d’organiser ces suppressions de postes de manière socialement acceptable.
Voir aussi l’édito en bas.
Markus Fischer
Transport marchandises : il existe une vision et un futur !
Editorial de Philipp Hadorn,
Secrétaire syndical SEV, Team Cargo
Le transport des marchandises est volatil. Si l’humeur est bonne, les marchandises roulent. Or, nous vivons une brève période de marasme, ce qui n’empêche pas les pronostics d’annoncer pour les deux prochaines décennies une croissance de 40 %.
CFF Cargo enregistre des déficits depuis toujours : quand il était entièrement intégré aux CFF, puis autonome et, enfin, dans sa phase actuelle de réintégration implicite. Divers concepts ont été testés, les réorganisations se sont succédé et les partenariats avec des privés ont tous échoué. Cependant, trois constantes n’ont pas bougé : la réduction des quantités, le démantèlement du personnel et les déficits.
Le transport de marchandises par le rail est un acte de volonté. En matière de trafic intérieur, la population suisse souhaite la même chose que ce qu’elle avait clairement exprimé dans les urnes avec l’initiative sur les Alpes : un transfert de la route au rail. Il est tout aussi évident que les entreprises qui confient les mandats de transport ainsi que leurs clients ne sont pas disposés à supporter l’intégralité des coûts. Le transport des marchandises leur revient en effet meilleur marché par la route que par le rail. Le choix est donc évident à faire. C’est la raison pour laquelle ce transport par le rail est en chute libre, sauf dans le trafic de transit grâce aux mesures de transfert étatiques.
Avec G-enesis, Cargo prévoit de poursuivre sur sa voie réactive : rationaliser les processus, réduire et harmoniser les offres et le matériel roulant, perdre le transport et démanteler le personnel. En raison du marasme conjoncturel, Cargo entend supprimer 80 postes à plein temps en 2025. Dans l’ensemble, un cinquième des effectifs disparaîtra d’ici à 2030. Toujours dans l’espoir chimérique d’atteindre un jour l’autonomie financière.
Le SEV imagine un Cargo plus actif : participation à la croissance, aux progrès techniques, au savoir-faire, au développement et à l’accroissement du personnel, à la recherche d’une solution pour atteindre les objectifs climatiques par le biais d’un transfert sur le rail.
Il faut décider si l’on entend poursuivre sur la voie des coupes au nom d’un espoir chimérique et déconnecté, ou si l’on entend se battre pour qu’un transport des marchandises par le rail à la fois bien organisé et financé de manière équitable puisse faire la preuve qu’un tel système est incontestablement pertinent en tant que partie du service public.
Cette vision, il s’agit de lui donner une visibilité. Grâce à notre CCT, personne ne doit craindre pour son salaire bien mérité.
Commentaires
Müller Thomas 19/02/2025 17:51:35
Ich unterstütze den obigen Artikel zur Darlegung und Begründungen zur umgehenden Sistierung des Projektes von SBB-Cargo "G-enesis".
Das was hier erneut abgeht ist eine "Bankrot-Erklärung" zum Einzelwagenladungsverkehr und weiterer Demontage des Schienengüterverkehrs (entschuldigt bitte - ich weiss es klingt etwas hart - aber Politiker der Strassenlobby und Firmenchefs des Strassentransportgewerbes sind noch viel härter ...!).
Ich kann mir nicht erklären warum, die Leitung von SBB Cargo wiederum nicht selber aktiv wird via Konzern SBB und BAV zur Politik, Verkehrsdepartement, beim BR Herrn Rösti.
Die Kostenwahrheit beim Schienengüterverkehr ist nach wie vor nicht gegeben. Der Strassengüterverkehr deckt bei weitem nicht seine verursachten Kosten - einerseits der Infrastruktur Strasse, aber ganz wesentlich die Umweltschäden (Feinstaub, Plastik, CO2-Ausstoss, Lärm, Belastungen nun gar des Trinkwassers) und gesundheitlichen Folgekosten, die die Allgemeinheit via Krankenkassenprämien, Steuern, unnötiger, weitere Strassen-Ausbauprojekte, etc, tragen muss. Wäre die Akzeptanz der Kostenwahrheit da, bei der Politik, und müsste der Lastwagenverkehr mehr zu diesen Kosten beitragen, sähe die Rechung besser aus.
Klar den Strassengüterverkehr braucht es auch - für div. Endtransporte ab Güteranlagen (Freiverlad, Terminals, etc).
Trotzdem: Meine eindringliche Frage an den SBB-Konzern und -Cargo: Warum lobbyiert / beantragt SBB-Cargo (analog wie beim Personenverkehr/Verkehrsverbünde) nicht auch Kostenbeiträge bei Bund und Kantonen für den Schienengüterverkehr??
Welche weitere Hilfe oder welchen weiteren Beitrag kann hier der SEV als Gewerkschaft weiter bieten - ich weiss, Philipp Hadorn tut sein möglichstes! Kann der SEV selber Vorstossen beim Verkehrsdepartement oder via Parlamentarier oder gar beim zuständigen BR Hr Rösti, als politisches Lobbying?
Danke an den SEV und die Kollegen Cargo, die sich täglich für den bestmöglichen Kundenservice einsetzen!
Thomas Müller, Luzern
Thomas Müller (pens. Anforderungsmanager Betriebsführung Infrastruktur SBB)
Giselihalde 9
6006 Luzern