AD de l’USS au sujet de l’UE
Protéger le service public et les salaires !
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Les syndicats ne pourront consentir à un accord entre la Suisse et l’UE que si les salaires et le service public sont garantis. Les délégués de l’Union syndicale suisse (USS) sont unanimes sur ce point. Lors de l’assemblée extraordinaire des délégués à Berne le 31 janvier, ils ont approuvé une résolution en ce sens.
« En Allemagne, lorsque j’achète un billet de train, c’est comme si j’achetais un billet de loterie », déclare Matthias Hartwich, président du SEV, devant les délégués de l’USS. « On ne sait pas où il faudra tout à coup changer de train, ni à quelle heure on arrivera à destination, si d’aventure on y arrive. Telles sont les conséquences de la libéralisation et de la privatisation du rail. Et ça, c’est une situation dont nous ne voulons pas ici, en Suisse. » Fondamentalement, le SEV et tous les autres syndicats soutiennent certes le rapprochement de la Suisse avec l’UE, mais pas à n’importe quel prix. Gilbert D’Alessandro, président de la VPT, résume les choses ainsi : « Nous sommes des Européens convaincus, mais nous n’aimons guère la Commission européenne qui s’est posée en fossoyeuse des acquis sociaux. » Or, la perte de la protection sociale explique parfois la montée des forces d’extrême droite dans toute l’Europe.
Le droit suisse sur les rails suisses
Dans le dossier de l’ouverture éventuelle du transport ferroviaire international de voyageurs, l’USS exige que les protections qui font l’objet de négociations soient applicables de manière intégralement autonome. Les salaires suisses et les conditions de travail suisses doivent être garantis en tout temps. De plus, le modèle de coopération doit être licite, l’intégration tarifaire doit être assurée et l’attribution des sillons doit impérativement relever de la souveraineté suisse. Le principe suivant doit s’appliquer : le droit suisse sur le rail suisse. « En tant que syndicat du service public nous ne pouvons pas cautionner une solution qui mettrait en péril notre système de transports publics fonctionnant bien, une solution qui péjorerait la sécurité et qui conduirait à une détérioration du bilan écologique », déclare Peter Käppler, président central d’AS. « La situation du trafic de marchandises nous inquiète. La privatisation des entreprises d’État exigée par la Commission européenne mène en effet au transfert des marchandises du rail à la route ». Une douzaine d’oratrices et d’orateurs ont laissé entendre que l’inquiétude était grande aussi dans d’autres branches.
Par exemple, la « réglementation européenne relative aux indemnités » est hautement problématique. Elle stipule que les entreprises étrangères sont tenues de payer en Suisse les frais de nuitée et de repas aux tarifs en vigueur dans leur pays d’origine (« indemnités polonaises en Suisse »). Il en va non seulement de montants énormes, qui feront ainsi défaut aux travailleurs, mais aussi de logements décents et de sécurité au travail. En effet, les salarié·es ainsi sous-payé·es n’auront d’autre choix que de dormir et de manger dans des camionnettes ou sur les chantiers.
Autre source d’inquiétude : l’accord sur l’électricité, en renégociation, selon lequel la Suisse devrait certes obtenir le plein accès au marché intérieur européen de l’électricité. Mais en contrepartie le marché suisse de l’électricité devra être complètement ouvert. À la place de l’actuel approvisionnement de base pour les ménages et les petites entreprises, il ne subsisterait plus qu’un modèle « de libre choix » dysfonctionnel, ce qui constituerait un affaiblissement considérable du service public intégral dans le domaine de l’électricité, et nuirait ainsi à la stabilité à long terme des prix.
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Des exigences concrètes
Le 20 décembre 2024, le Conseil fédéral a déclaré closes les négociations avec la Commission de l’UE. Selon lui, les objectifs poursuivis par les négociations étaient atteints. Cependant, les détails restent jusqu’ici inconnus, même si la Confédération a annoncé qu’elle était prête désormais à mener des pourparlers avec les syndicats et les employeurs.
C’est donc avec des exigences concrètes que les syndicats entament aujourd’hui ces pourparlers. Outre les exigences émises par le SEV sur le transport ferroviaire international de voyageurs, les points suivants ont été définis : obligation pour les maîtres d’ouvrage et les donneurs d’ordre d’endosser la responsabilité pour les infractions commises par leurs sous-traitants, réduction des durées de traitement auprès des cantons, renégociation de la réglementation européenne relative aux indemnités, davantage de conventions collectives de travail déclarées de force obligatoire, meilleure protection contre le licenciement pour les salarié·es qui s’engagent en faveur de bonnes conditions de travail et de la sécurité au travail, amélioration de la situation des employé·es temporaires, pas de libéralisation du marché de l’électricité.
Les syndicats suisses sont soutenus par leurs homologues européens. Esther Lynch, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES) confirme clairement sa position : « La CES se tient résolument au côté des syndicats suisses pour tout ce qui touche à la défense des droits des travailleurs et à la préservation de services publics forts », déclare-t-elle.
Dans la résolution votée par les délégué·es à la fin de l’assemblée, ceux-ci soulignent le fait que l’heure est venue de durcir le ton dans les négociations. Si le service public et les salaires ne sont pas protégés, il ne pourra pas y avoir de consentement à l’accord entre la Suisse et l’UE.
Michael Spahr/USS