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Situation dans le monde du travail et conditions pour la sortie de crise du point de vue syndical

La préservation du pouvoir d’achat et des emplois est le meilleur programme conjoncturel

© congerdesign / Pixabay

La crise due aux mesures de lutte contre la pandémie touche la Suisse avec une force sans précédent. Pour éviter des problèmes sociaux et des dégâts économiques trop importants, les salaires doivent être garantis et les licenciements évités.

La préservation des places de travail et du pouvoir d’achat constitue aussi la condition nécessaire pour toute stratégie de sortie. L’USS demande par ailleurs au Conseil fédéral de présenter enfin une solution pour les travailleuses et travailleurs particulièrement vulnérables, pour les indépendant-e-s et pour le financement de l’accueil de jour des enfants.

Garantir les salaires, éviter les licenciements

La crise engendrée par les mesures de lutte contre la pandémie touche tout particulièrement les revenus faibles et moyens. Le chômage partiel peut signifier une perte de salaire allant jusqu’à 20 pour-cent. Les personnes licenciées ont de la peine à trouver un nouvel emploi, en particulier si elles sont plutôt en fin de carrière, car les entreprises font preuve d’une grande réserve quant aux embauches. L’économiste en chef de l’USS Daniel Lampart constate avec inquiétude qu’« entre fin mars et le 9 avril, 10'000 personnes de plus se sont retrouvées au chômage. Lors de récessions précédentes, nous avions connu des hausses de 4000 personnes au chômage par mois ».

Pour les salarié-e-s aux revenus faibles et moyens, il faut donc de nouvelles mesures telles qu’une garantie du paiement du salaire à 100% ou une réduction sur les primes d’assurance maladie financée par la Confédération. Simultanément, les entreprises qui recourent au chômage partiel doivent s’abstenir de licencier ou de payer des dividendes. Quant aux travailleuses et travailleurs plus proches de l’âge de la retraite, ils doivent bénéficier d’une protection accrue contre le licenciement. Pierre-Yves Maillard, président de l’USS, affirme donc que « la préservation du pouvoir d’achat pour les revenus bas et moyens doit être la première priorité dans la lutte contre la crise ». La présidente d’Unia et vice-présidente de l’USS, Vania Alleva, ajoute : « il faut à la fois contrôler la pandémie et lutter contre les injustices sociales. Aujourd’hui, les filets de sécurité ne protègent pas encore tout le monde ».

Prévenir une crise de l’accueil de jour des enfants

Les hésitations du Conseil fédéral concernant le sauvetage financier de l’accueil de jour des enfants sont incompréhensibles en particulier au regard des défis posés par la sortie progressive de la situation extraordinaire actuelle. En effet, de nombreuses structures sont menacées dans leur existence, et avec elles, c’est tout un système patiemment construit qui l’est aussi. Et quand bien même la situation se normaliserait sans perte en même temps que les écoles rouvriraient, un problème persisterait : les grands-parents, en tant que personnes à risques, pourraient bien ne pas pouvoir assumer des tâches de garde pendant encore un certain temps. On estime qu’il ne faudrait pas moins de 50'000 nouvelles places pour compenser cette absence.

Giorgio Tuti, président du SEV et vice-président de l’USS, rappelle les défis auxquels sont actuellement confrontés les salarié-e-s du service public, dont la crise achève de démontrer l’importance. Il souligne qu’un soutien suffisant aux structures d’accueil de jour des enfants est impératif pour envisager avec sérénité la levée progressive des mesures.

Une solution rapide pour les travailleuses et travailleurs vulnérables

En vue d’une levée progressive des mesures, il s’agit aussi de trouver rapidement une solution pour les salarié-e-s particulièrement vulnérables, pour lesquels le virus continuera à constituer une menace très sérieuse. Alors que l’Office fédéral de la santé publique les invite à rester à la maison à tout prix, ces personnes sont contraintes de continuer à travailler. Le Conseil fédéral doit enfin prendre une décision à la hauteur de l’enjeu. L’USS est ouverte à une définition plus précise des critères de vulnérabilité. Tout laisse à penser que le coronavirus continuera à être une menace pendant un certain temps. Il n’est pas acceptable, dans ce contexte, que les mesures de lutte contre la contagion et de protection de la santé ne soient appliquées qu’insuffisamment sur les lieux de travail. C’est du reste un obstacle pour la reprise à plein de l’activité économique. Il faut corriger les manquements, et vite : les syndicats en sont convaincus, et ils sont prêts à y contribuer.

A lui seul, le virus ne rendra pas le monde meilleur. Toutefois, face à lui, d’innombrables manifestations de solidarité se sont produites, à tous les niveaux, et malgré des perspectives économiques menaçantes. Si la pandémie nous demande de mettre entre nous une distance physique, face à elle, nous avons tenu bon ensemble. La solidarité doit donc être également le maître-mot de la sortie de crise, aujourd’hui plus que jamais.

Revendications de l’USS

Pour améliorer la situation des travailleuses et travailleurs dans la période difficile que nous traversons, l’USS formule les revendications suivantes :

  • Les travailleuses et travailleurs vulnérables doivent enfin pouvoir rester à la maison et voir leur salaire garanti, ou être protégés, au travail, par des équipements et des mesures bien définies et réellement efficaces. Il appartient au Conseil fédéral d’apporter une solution en ce sens.
  • Pas de faillites ni de licenciements dans les entreprises : les entreprises qui font usage des soutiens proposés par la Confédération ne doivent pas pouvoir licencier leurs employé-e-s, ni distribuer des dividendes. Les salarié-e-s en fin de carrière qui ont une certaine ancienneté doivent être mieux protégés contre le licenciement.
  • Le maintien du pouvoir d’achat est d’une importance capitale : les revenus bas et moyens doivent être garantis à 100 % et une réduction sur les primes d’assurance-maladie financée par la Confédération doit être consentie.
  • Protéger le système d’accueil de jour des enfants : les collectivités publiques doivent à tout prix préserver les structures de tout problème financier pour que la garde des enfants puisse être assurée. Parallèlement, l’absence durable des personnes âgées pour assurer ces tâches doit être compensée par la création de places et la poursuite de l’allocation perte de gain pour parents.
  • Faire respecter concrètement et complètement, y compris par des contrôles, les normes de protection de la santé sur les lieux de travail.
  • Accorder à l’assurance-chômage des moyens financiers supplémentaires, puisque les 6 milliards initialement prévus seront probablement épuisés dans le courant du mois d’avril.
  • Mise en place d’un fonds pour les cas de rigueur parmi les indépendant-e-s, par la Confédération seule ou avec les cantons, ainsi que d’une aide spécifie à Swiss et aux entreprises du secteur aérien pour surmonter la crise.
  • Participation de la Suisse à la coordination internationale pour la stabilisation de la conjoncture.
  • Maintien des droits des travailleurs étrangers (reprise de l’octroi, pour l’instant suspendu, des permis de travail.