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Léman Express

«Nous devons être unis et déterminés pour les emplois»

Alors que le Léman Express devrait être en service dans deux ans, on y voit plus clair sur les conditions de travail du personnel employés sur le plus grand RER tranfrontalier d’Europe.

Valérie Solano lors de la manifestation aux Eaux-Vives le 24 novembre 2015. A cette occasion, les manifestants avaient revendiqué des conditions de travail sans dumping sur le Léman Express.

Valérie Solano, secrétaire syndicale SEV a réuni depuis plusieurs années les cheminots suisses et français pour élaborer une ligne syndicale commune dans le dossier du Léman Express. Interview.

Valérie, une séance a eu lieu le 30 novembre. Qui y participait et qu’en est-il ressorti ?

Le SEV, avec tous les syndicats tant français que suisse impliqués, a réussi à instaurer des rencontres régulières avec les CFF et la SNCF qui pilotent le projet Léman express. S’y ajoute Lemanis, l’entité juridique qui chapeaute le projet. Ces rencontres ponctuent et valident les informations que nous avons sur le développement du projet. Il est important pour nous, à ce stade, d’avoir des certitudes sur les conditions de travail du personnel, mais également de savoir ce qui se dessine pour la suite. Je le rappelle, nous redoutons que ce réseau – le plus grand réseau ferroviaire transfrontalier en Europe – soit un cheval de Troie pour introduire des conditions de dumping salarial.

Les informations reçues sont-elles inquiétantes ?

Nous avons appris lors de cette rencontre que les autorités organisatrices – cantons de Genève et de Vaud, ainsi que la Confédération (côté suisse) et la région Auvergne-Rhône-Alpes (pour la France) – ont décidé de signer une lettre d’intention entérinant un exploitant unique (Lemanis) qui sera chargé de l’exploitation et de la commercialisation du Léman express. Dans le fond, c’est la création d’une société ferroviaire subventionnée. C’est ce que nous craignions, mais cette lettre d’intention prévoit que l’autorité organisatrice ne mette pas au concours de prestations ferroviaires avant 10ans (6 pour la Suisse). Pour nous c’est une assurance, limitée dans le temps cependant !

Y voit-on plus clair sur le statut du personnel employé sur le Léman express ?

Le personnel roulant qui travaillera sur le réseau sera, à sa mise en service, du personnel des CFF et de la SNCF, travaillant aux conditions de ces deux entreprises. Pour le contrôle, il sera effectué par les agent du SPO (contrôle sporadique) et il n’y aura pas de contrôleurs, comme dans les RER. Pour nos collègues français c’est une disparition sèche. Pour nous qui fonctionnons déjà sans contrôle dans les régionaux, cela reste un point d’inquiétude en termes de proximité et de sécurité des usagers.

On imagine bien que les défis syndicaux ne manquent pas dans ce dossier. Peux-tu les préciser ?

L’un des défis syndicaux majeurs, c’est de formuler des revendications communes entre collègues français et suisses. Bien sûr, c’est formidablement riche de partager nos cultures syndicales, nos préoccupations et nos manières d’aborder les problèmes, mais parfois les enjeux ne sont pas les mêmes et cela prend du temps pour déterminer des revendications communes. Nous n’avons pas toujours le même tempo.

Si tu prends du recul dans ce dossier, qu’a-t-on obtenu depuis que tu as essayé d’unir le personnel suisse et français ?

Les conditions de travail qui seront appliquées et le gel des mises au concours démontrent le bien fondé de nos craintes et prouvent la nécessité de notre action.

Action qui n’est pas terminée. A quoi faut-il faire attention ?

Il faut continuer à anticiper car face à l’entité organisatrice Lemanis, nous devrons être unis et déterminés pour préserver emplois et conditions de travail de chaque côté de cette frontière. Très concrètement, il nous faut trouver comment encadrer la libéralisation afin de garantir la qualité et la sécurité des prestations, comme des salaires. Et imaginer les meilleures manières (par le biais de contraintes dans les appel d’offre via les CCT) d’agir. Nous allons aussi devoir faire face à l’automatisation de la conduite. Pour cela, il faudra savoir remettre l’humain au centre. Mais surtout garder vivante la mobilisation de toutes et tous pour garder la fierté de cette identité de cheminot partagée de chaque côté de la frontière.

vbo